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article imprimé
rédaction: Stephen Dörr
jupe f.
[ÉtymologieEmprunt à l’it.mérid. JUPPA “espèce de vêtement, prob. veste d’homme ou de femme, d’origine orientale”. En Italie, la première att. mlt. est zippa dans un doc. 990 du Codex Cavensis, AGl 15,362; l’att. la plus ancienne de juppa date de 1053, Codex Cavensis, AGl 15,346 (pour des att. du 12es., cf. PellegrAr I 115; 339). La première att. dans un texte it. est guba (1284, CortZol 501a), la forme moderne giubba est attestée dep. après 1308 (G. Villani, Battaglia 6,857b). Le mot it. est emprunté à l’ar. ǧubba “sorte de tunique”, Wehr5 163a; Kiesler 94. Le FEW 19,58b explique les formes romanes en -i- comme adaptations de l’ar. ǧubba («Ar. ǧubba ist teils mit u, teils mit i in die rom. Sprachen aufgenommen worden»), bien que Corom2 3,533a explique ces formes par ar. ǧibba, var. de ǧubba, ce qui est plus convaincant. Quant aux formes afr. en -i-, on est tenté de les expliquer comme variations dialectales, même si les att. ne prouvent pas cette thèse. De l’it.: occ. jupa (dep. ca. 1184, Rn 3,600b; Lv 4,280a), cat. gipó, jupó, jupa (dès 1348 [jupa], CoromCat 4,501b)(1). – Pour les continuateurs des dérivés fr. et it. dans d’autres langues, v. FEW 19,58b-59b.
Rem.: Les sens précis de jupe variaient avec les modes diverses. Pour une description détaillée de la jupe au cours de l’histoire, v. ViolletMob 3,279-306; 4,61-70.
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(jupe PartonG 7489; ChétifsM 3514; AntiocheD 1473; 8560; JerusT 6276; 6283; ContPerc1lR 8767 [= vR 14567; pR 8713]; ChastPereaaH 161a; Bueve1S 8599; ParDuchP 187; JErartN VII 27; AimeriD 1624; 1661; 1803; AloulN 64; etc.etc.JerusT 6276 / 6283, ⁠agn. jope AspremlM 934, ⁠s.l. juppe CoincyII1K 202, jube JMeunAbB VII 31; PartonG 7489 var. ms. 1em. 14es., ⁠pic. gupe ca. 1175 GautArrErR 4670, gipe HervisH 883; 1248; 1390; etc.)
  • “vêtement de dessus, couvrant le buste, prob. sorte de pourpoint, souvent garni de fourrure et taillé dans des étoffes précieuses, porté par hommes ou femmes”(ca. 117517es., GautArrErR 4670 [Se gent l’ont molt reconfortee, Une gupe orent aportee Molt rique et bone de samis; Vestue l’a l’empereïs]; PartonG 7489 [jupe porprine]; ChétifsM 3514 [la jupe qui de vair fu forree]; AspremlM 934; AntiocheD 1473 [jupes d’orfrois]; 8560; JerusT 6276 / 6283 [Li amirals avoit une jupe vestie, D’un sidoine ert li dras plus vermels d’une alie, Li foreüre en ert de beste marmorie, Ja nus hom qui le port n’ara mal en s’oïe Ne n’ert envenimés por nule encanterie Ne li cars desor lui navree ne plaïe: .M. ans giroit en tere ains qu’ele fust porie. De pieres prescieuses ert la jupe clofie]; ContPerc1lR 8767; ChastPereaaH 161a; Bueve1S 8599; EscoufleS 4415; HervisH 883 [gipe de gris]; 1248; 1390; etc.; ; etc.etc.JerusT 6276, TL 4,1868 [sépare “ein Männergewand (orientalischen Ursprungs)” et “ein Frauengewand”, non adéquat]; Gdf 4,672a; AND 372a; Hu 4,736b; FEW 19,57b)
  • ⁠par métonymie “sorte d’étoffe (de soie)”(2) (14es. ?, doc. Bar sur Aube, Gdf [Et autel tonneu de dras de soie, et de cendez, et de jupes, et de pallioz, et de cameloz], Gdf 4,672a(3))
jupel m.
  • “vêtement de dessus, couvrant le buste, prob. sorte de pourpoint, souvent garni de fourrure et taillé dans des étoffes précieuses, porté par hommes ou femmes”(ca. 12001528(4), AthisH 18497 [(Le vassal) En un jupel cort d’auqueton, Porpoint et forré de coton, Remest sengles, bien fu tailliez]; FlorenceW 88; BatAnnezinW 5; RomPast II 58,47; RègleTempleC 110; 111; 113; 170; AdHaleRobV 113; 270; 679; 682; CourtAmS 446; doc. 1302 DehDoc 144; SDieudD 74 [Point seloncq vostre estat, fille, ne vous portés, Vous avés des jupiaus et des robes assés]; doc. 1316 Gay; doc. 1317 MichelEtoffes p. 170n1; JMoteVoieP 1044, TL 4,1869; Gdf 4,672b; FEW 19,57b)
juperel m.
(giperel 13es. RomPast II 30,41)
  • “vêtement de dessus couvrant le buste, prob. sorte de pourpoint, souvent garni de fourrure et taillé dans des étoffes précieuses” [dans la seule att. porté par un homme]⁠(13es., RomPast II 30,41 [Li quars, qui ot non Gautiers, Si se fist trop cointes…; Vait faisant le ronbardel(5); Vestus fu d’un giperel Deguisié sans pointe], TL 4,1872; Gdf 4,279c; FEW 19,57b)
jupon m.
(jupon doc. 1398 Gdf(6), ⁠agn. jupoun doc. 1345-49 Archaeologia 31 (1846) 34(7), ⁠s.l. juppon 1368 DeschQ 7,314,77; doc. 1380 Gdf; doc. 1382 LespMét 3,210 § 3; ChronGuesclF 7216; doc. 1389 Gay 2,60a, gipon FroissChroniii1D 74 [bis], gippon doc. 1363 ProstInv 1,52; 116 ; 1,554; 1,1557; doc. 1376 Gdf; ; ChronGuesclF 1843; 1948; 2007)
  • “vêtement de dessus couvrant le buste, prob. sorte de pourpoint, souvent garni de fourrure et taillé dans des étoffes précieuses” [dans quelques contextes comme partie de l’armure]⁠(1345-1349Trév 1771, doc. 1345-49 Archaeologia 31 (1846) 34 [Et ad faciendum unum jupoun de taffata blu]; [doc. 1363 ProstInv 1,52 [ung gippon de drap]; 116 [2 gippons de miege soie, 1 gippon blanc et 1 cote blainche]; 1,554 [.j. gippon de fustaingne noire]; 1368 DeschQ 7,314,77 [Ly uns se vest court d’un juppon, Ly autres long jusqu’au talon]; doc. 1372 ProstInv 1,1557; doc. 1376 Gdf; ; doc. 1382 LespMét 3,210 § 3 [juppons de soye]; ChronGuesclF 1843; 1948; 2007 [Quant vint a l’endemain que Bertran se leva, Un gippon bien ouvré vesti et boutonna, Un haubregon dessus vesti et endoça, Dessus un haubregon un grant jaques posa]], TL 4,1872; Gdf 4,673a; Gay 1,63a; 778b ; 2,60a; MED 5,429b; TLF 9,247b; 10,803a(8); FEW 19,57b)
mfr. juponier m.
(juponnier doc. 1389 Gdf; FroissChronL 10,119, jupponnier FroissChron[L 10,119] var. ms. 15es. Gdf, giponnier BonetJMeunA 600, gipponnier doc. 1372 PéageChalonA p. 9)
  • “faiseur de jupons(13721402, doc. 1372 PéageChalonA p. 9 [gipponniers, chaussetiers, tapissiers]; doc. 1389 Gdf; FroissChron Gdf [La avoit jupponnier de Londres… qui avoit apporté soixante juppons dont aulcuns de ces gloutons estoient revestuz]; BonetJMeunA 600; FroissChronL 10,119; doc. 1400 Ord 8,385; FroissChron3D 230,74 [Et en i (à Calais) avoit la pluisseurs ouvriers juponniers, parmentiers, … fourniers et tavreniers], Gdf 4,673b; TL 4,1872 [renvoie à Gdf]; Lac 7,122b; FEW 19,58a(9))
mfr. juponnerie f.
(juponnerie doc. 1358 Gdf, jupponnerie doc. 1382 LespMét 3,212 § 18; 19 , jouponnerie doc. 1363 Gdf)
  • “métier d’un faiseur de jupons(1358; 1363; 1382, doc. 1358 Gdf [l’imposicion de toute juponnerie]; ; doc. 1382 LespMét 3,212 § 18; 19 [Item que nuls ouvriers forain ne marchand forain ne puisse vendre ou faire vendre a Paris aucunes denrees de pourpointerie et jupponnerie], Gdf 4,673a; Lac 7,122b; FEW 19,58a(10))
jupeor m.
(gippieres [c.s. sg.]⁠ doc. 1281 BanMetzW 7,498a, gippour doc. 1267 ib.; doc. 1281 BanMetzW 7,164b)
  • “faiseur de jupes(1276; 1281, doc. 1267 BanMetzW 7,498a [Colignon, gippour, ensom l’ospital a Porte Serpenoise (= BanMetzW 7,111a)]; doc. 1281 ib. [Garcerias, gippieres, an la place an Humbecort]; doc. 1281 BanMetzW 7,164b [Garsire, gippour])
juperesse f.
(gypperasse doc. 1293 BanMetzW 7,498a)
  • “femme qui fabrique des jupes(doc. 1293, doc. 1293 BanMetzW 7,498a [Armanjate, lai gypperasse, an lai Nueve Rue])
francoit. juber m.
[ÉtymologieAdaptation de vénitien *ÇUBER “faiseur de pourpoints”(11). L’étymon est appuyé par lt. çupariis (doc. Venise 1278, Capit. delle arti veneziane, éd. par G. Monticolo, 1,4); doc. 1279 / 80 çuparii (ib., 24n); etc. Pour le -b-, cf. déb. 14es. [de arte] cubarie (ib. 42) et doc. 1307 çuba (Testi veneziani del Duecento, par A. Stussi, 44,10). Quant au suffixe -er, cf. ib. § 6.1 («[<ARI(US)] Nel Veneziano si ha regolarmente -er(o)».).]
  • “faiseur de jupes(1275, MartCanL 2,126,1 [Vos avés bien oï coment ciaus maistres de coton alerent veoir lor signor et lor dame, et je vos conterai des maistres que funt les coutres et les jupes… Or vos ai conté des maistres jubers et cultrés], cf. aocc. jupier “celui qui fabrique des casaques” (2em. 13es., Rn 3,600b) et fr. jupier “celui qui est spécialisé dans la confection des jupes des femmes” (dép. 1881, TLF 10,802))
enjuper v.tr.
(enjuper ca. 1227 CoincyII1K 199, enjupper CoincyII1K 202)
  • “donner une jupe (à qn pour le rémunérer)”(ca. 1227, CoincyII1K 199 [Cil grant signeur cialz avant traient Et cialz enchappent et enjupent Qui les atruppes leur atruppent (TL 3,692,38 glose ce passage: «leichtsinnige Leute belohnen Sänger, die ihnen leichtfertige Dinge vortragen»)], TL 3,436; Gdf 3,193c; FEW 19,57b)
  • “mettre sur soi (une jupe)” (ca. 1227, CoincyII1K 202 [Cil en enfer vont en juppant (éd. enjuppant, à corriger; v. → juper) Qui vont tex juppes enjuppant], TL 3,436; Gdf 3,193c; FEW 19,57b)
(1) Pour esp. port. aljuba, attesté dep. 943 (dans un texte mlt., v. DEM 3,367b), v. Corom2 3,532b (sous jubón, interprété comme dérivé de aljuba ou juba; plutôt emprunté au français ?).
(2) Cf. le doc. lt. se référant à l’an 1241 cité par BourquelotChamp 1,262 n3: Excepto recto pondere bougueranni, cameloti, jube
(3) Cf. BourquelotChamp 267: «ce mot (i.e. jube ou jupe…) paraît venir de l’arabe djobbah ou djobbeh (ǧubba), servant à désigner une étoffe de soie et quelquefois de laine, fort en usage autrefois en Égypte…»; il donne des att. mlt. de 1201 et du 13es. (Frédéric II).
(4) Attesté surtout en picard.
(5) Cf. TL 8,1342; Gdf 7,208a: “jeune homme recherché dans sa toilette et dans ses manières qui assistait aux fêtes appelées robardies”.
(6) Jupon dans ProstInv 1,494 (daté de 1365) provient de la Collection de Bourgogne qui présente un texte modernisé.
(7) Correspond à doc. 1347, Gay 2,60a.
(8) Atteste jupon au sens de “jupe de dessous, généralement en lingerie, porté par les femmes” dep. 1680.
(9) Cf. frm. juponnier “homme qui court les femmes”, TLF 10,803a: dér. indépendant.
(10) Cf. frm. juponnerie “ensemble de jupons”, TLF 10,803a.
(11) Limentani, MartCanL CCXXXII, cite vénitien zubero sans l’attester; au § 19,1, jubers est caractérisé comme ‘venezianismo lessicale’.