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rédaction: Marcel Juneau
gastel m.
[ÉtymologieVient prob. d’un abfrq. *WASTIL que l’on suppose d’après asax. mha. aangl. wist “nourriture”, anord. vist, et qui serait dérivé de *WAHS “cire” [cp. aha. wahs Schützeichel et all. Wachs]. Pour les autres hypothèses avancées (Diez mha. wastel, Brüch vasculum, Spitzer dér. du fr. gaster), voir les objections du FEW et de Gam2. Du nord de la France, le mot a pénétré dans certains parlers romans (occ. gastel, gastal [Rn 3,439b], it. guastèlla [14es. BattAl 3,1888a], gatò [18es., Battaglia 6,608c; BattAl 3,1773a, sous la forme gattò], gâteau [19es. BattAl 3,1771a], cors. guastellu, -a, sic. guastedda; en outre gastellus, wastellus, etc., largement attesté en lt. médiéval [DC 4,41c, et 8,409c, où il définit: “panis delicatior, vel placentae species”; aussi en Angleterre, v. Latham, p. 521a, qui donne de nombreuses attestations dès les 12e et 13e siècle: wastellus ca. 1200, vastellus ca. 1192, ca. 1290, gastellus 1190, guastellum ca. 1200, 13es.; etc.], ainsi qu’en bret. gwastell; d’autre part, il est retourné dans quelques parlers germaniques (mha. wastel, gastel, suisse all. als. wastel). Le sens de gastel en afr. est difficile à préciser. Dans quelques rares attestations il a nettement le sens de “sorte de galette”; mais dans la majorité des cas on ne peut préciser son sens. Une étude de tous les mots se rapportant à la même sphère conceptuelle (pain, dariole, gaufre, simenel, chanestel, raston, etc.) s’imposerait (BauerGebäck porte essentiellement sur les patois mod.). Gastel a perdu tous ses dérivés entre l’afr. et l’époque moderne.-FEW 17,547; REW 9514]
(gastel ca. 1140 GaimarB 136 [pl. -els]; ErecR; YvainF; PercR; AimeriD [pl. -iax]; HuonR [pl. -iaus]; GaydonG; ColMusB2; MousketR [pl. -iaus]; doc. mil. 13es. BraultBalzon [pl. -eus]; PrestreAlisB [pl. -ieax]; doc. 1280 BraultBalzon [pl. -eus]; CrieriesB [pl. -iaus]; etc., gasteaus [c.s. sg.]⁠ RosemLec, gastiax [c.s. sg.]⁠ ErecR; RosemM [c.s. sg. -iaus]; Méon [pl. -iax], gastiau AimeriD var. [c.r. pl.], gastiaul GirRossAlM, gastiel VengRag FEW; MousketR, gastell doc. 1275 BraultBlazon [c.r. pl.], gasté Erec ms.BN fr.1420 Gdf [= ErecR 3140]; RCambrM, ⁠norm. guastel GaimarB 127 [pl. -els]; ChGuillS 127 [pl. -els], ⁠lorr. gaistel ColMusB3 [ms. lorrain C], ⁠agn. flandr. pic. wastel ProtK [pl. -els]; [DialFrFlamM [c.s. pl. -iaus]; doc. 1355 Gdf [pl. -iaus]], ⁠champ. lorr. watel MenReimsW [pl. -iaus]; doc. 1269 Gdf [pl. -ez])
  • “sorte d’aliment fait de pâte” (dep. ca. 1140, GaimarB 127 [E li reis e li chevalier Lui dunoent de lur mangier; Esquanz lui dunoent guastels, Esquanz quartiers de simenels, Les altres hastes e gelines]; 136 [E as vadlez de la meisun Feseit suvent mult large dun De simenels, de canestels E de hastes e de gastels; gloss. “fine wheaten bread”]; ErecR 3140; 3143; 3167 [gloss. “galette de froment”]; YvainF 1049; PercR 1768; ProtK 4816 [Wastels, walfres et simenels Et vins et mes pleners et bels; ProtKH: “Kuchenbrötchen”]; VengRag FEW; AimeriD 2170 [Le pain font querre par tote la cité; Qui ot gastiax ou blanc pain beluté, Vendre le pot si a sa volenté…]; ColMusB2-3 IX 52; MousketR 29758; doc. 1269 Gdf ; etc., TL 4,207; Gdf 4,241b; 9,688b; FEW 17,547a)
  • gastel rosti “gastel cuit (?)” (ChGuillS 1410 [Et li aportet un grant pain a tamis, E desur cel dous granz guastels rostiz, Si li aportet un grant barün porcin, E en apruef un grant poün rosti]; 1415; 1428, TL 4,207 [v. aussi ci-dessous rosti gastel])
  • gastel rasis gastel dont le gonflement produit par la cuisson a diminué (?)” (Rose ms.BN fr.1573 fo84d [Plus foible que .I. raciz gastel; sans idée péjorative malgré Gdf; v. ci-dessous le passage qui suit et gastel rasis où l’une des attestations montre explicitement que rasis n’est nullement péjoratif]; [doc. 1355 [Gdf 6,608b; le même passage plus long 4,241c avec la date 1372: Doivent li wastelier qui font wastiaux c’on dist razis qu’il cuisent en leurs fourniaux faire bonnes denrees et loyaux]], Gdf 4,241c sub gastelier; 6,608b; 10,486a [ces diverses attestations sont sans doute à mettre en relation avec l’expression française pain rassis attestée seulement depuis Est 1549, FEW 11,401b, BW5 sub asseoir])
  • gastel rasti gastel fait avec des raclures de pâte (?)” (CrieriesB II 285,161 [L’autres crie: “Gastiaus rastis, Je les aporte toz fetis”]; MontRayn V 193 [La baiasse s’appareilla .I. gastel rasti qu’ele avoit]; Méon I 304,116 [Gastiax rastiz, Menuz braïz Et flamiche salee], TL 4,207; 8,327; Gdf 6,614b; FEW 10,90b, [v. aussi ci-dessous gastieax rastis buletés et ratiz gastel. Le FEW rattache rasti, attesté uniquement dans l’expression gastel rasti (le FEW donne gostel rastiz sans doute par erreur typographique) à la famille de *RASǏTORIA et définit “fait des raclures de la pâte” (10,93n7) corrigeant ainsi Gdf qui donne comme défiinition “grillé”. Cette étymologie et par conséquent la définition de Wartburg ne sont cependant pas assurées. Il faut en effet mettre en relation gastel rasti avec gastel rosti et gastel rasis. Il y a eu sans aucun doute des interférences qui rendent difficile toute définition dans l’état actuel de notre documentation; le problème est à étudier])
  • gastel buleté gastel de farine tamisée (?)” (HuonR 2925 [gloss. “gâteaux ou galettes”]; PrestreAlisB 260 [gastieaux rastis buletés; TL 4,207 recommande par erreur de lire rostis, cp. cependant 8,327, où le même passage est cité sans correction suggérée], TL 4,207; 8,327)
  • gastel “sorte de galette” (PercR 3289 [De la hance de cerf al poivre Uns vallés devant als trencha, Qui a lui traite la hanche a Atot le tailleoir d’argant, Et les morsiax lor met devant Sor un gastel qui fu entiers; gloss. “morceau de pain plat”; HenryChrest définit “morceau de pain plat, assiette de pain”; BartschChrest “assiette (de pain), Teller (von Brot)”; Foerster définit “Brotkissen” et indique une variante platel, v. aussi TL]; [DialFrFlamM B 1 b [Aussi sont darioles et waufres, Wastiaus et tourtiaus : Derve couken ende couken; derf signifiait en mnéerl. “sans levain”, v. Lozinski CarCharL p. 179]], TL 4,207)
  • gastel a feve “sorte d’aliment fait de pâte où l’on a introduit une fève” [de nos jours, ordinairement à la fête des Rois]⁠ (CrieriesB II 285,165 [“Gastel a fevel” orroiz crïer], TL 3,1799; 4,207)
  • avoir trouvé la feve au gastel “avoir eu la chance” (JMeunTresM 340 [Glorïeux flun, glorïeuse eve, Qui lavas ce qu’Adam et Eve Ont par leur pechié ordoié, Tu trovas ou gastel la feve], TL 3,1799)
  • gastel employé comme valeur minimale⁠ (RCambrM 4497 [Et lor escuz fisent si depecier Q’en tout le mieudre nen avoit tant d’entier C’om i couchast .j.  gasté de denier]; GaydonG 240 [Et va ferir Girart de Montrevel Parmi son elme…; Ausiz li fent com feïst .I. gastel]; MousketR 18867 [il dounast ains un castiel Que nus autres un seul gastiel]; RosemLec 7884 [De cele part est li chasteaus Si foibles qu’uns ratiz gasteaus; var. RosemM 8665 rostis gastiaus]; 10010 [chastel Plus foible qu’un ratiz gastel; var. RosemM 10786 rosti gastel]; GirRossAlM 84 [Je ne prise ne terre ne cité ne chastiaul… la valeur d’ung gastiaul], TL 4,207)
  • ne valoir un gastel “ne servir à rien” (EnfRenC 851 [Sus son secu fiert Guymar de Pymel, Toutes ses armes n’i valent un gastel; gloss. “non valer nulla”])
  • estre tourné aux gastiaus “être en déconfiture (en parlant de personnes)” (MenReimsW 288 [Et quant l’empereres Otes vit que tuit estoient tournei aus watiaus (var. gast; a desconfiture), si tourna sa resne et s’en fuï; interférence avec gast m. “destruction, etc.” → gast], TL 4,208; Gdf 4,241c)
  • gastel “tourteaur (t. de blason)” (mil. 13es., Mathieu de Paris [a .III. gasteus de blanc; cp. aussi chez le même: vastellis albis]; doc. agn. ca. 1275; doc. ca. 1280; doc. agn. ca. 1300 [E le Amauri de Saint Amant, Ki va prouesce (var. provesté) reclamant, De or e de noir fretté, au chief O trois gasteaus de or derechief]; BraultBlazon 146a; 215a, v. gastelet)
  • ⁠[comme nom de personne: NercArrB an 1263, p. 50a; 1266, p. 50c; 1329, p. 75c; 1349, p. 82a; Taille 1297M p. 300]⁠
gastelle f.
(gastelle doc. ca. 1275 BraultBlazon, castele id., ⁠flam. watielle doc. St-Amand 13es.)
  • “sorte d’aliment fait de pâte” (doc. St-Amand 13es. Revue du Nord 22,134, FEW 17,547b [définit “gâteau”])
  • ⁠(t. de blason) gastelle en le chief (doc. ca. 1275 BraultBlazon [a treis gastelle … en le chef; var. a 3 casteles … en le chief])
  • ⁠[comme nom de personne: Wastella Maroie NecrArrB an 1239, p. 35a].⁠
gastelet m.
(gastelet ca. 1200 AubreeE; GuillDoleS; HuonR; AucR2; GautLeuL2; ColMusB2; GGuiB; WatrS; doc. 14es. Gdf, ⁠rég. gestelet doc. 14es. Gdf, ⁠hain. wastelet GautLeuS)
  • “petit gastel (ca. 1200Cotgr 1611, [AubreeE, v. ci-après gastelet rasis]; AucR2 XXI 12 [nos dona denerés, Dont acatrons gastelés; gloss. “dimin. de gastel, gâteau, employé par les bergers”]; GautLeuL2 III 540,182; ColMusB2 35, TL 4,208; Gdf 4,241c; FEW 17,547b [donne 12es. comme première date, mais aucune attestations dans ce siècle; survit dans certains parlers de la Galloromania, notamment dans sa partie orientale])
  • gastelet rasis “petit gastel dont le gonflement produit par la cuisson a diminué (?)” (AubreeE 412,24 [Et des pastés fait venir tost, C’om fait a Compiengne faitis, Et les boins gastelés rasis Lors fait venir priveement Et du boin vin a son talent; passage classé malencontreusement par TL sous rastiz et non sous rasseoir où l’on relève cependant l’attestation qui va suivre]; GGuiB II 10723 [Lors les veïssiez entrebattre Et donner meriaus et poingnïes Et muselees et groingnïes En lieu de gastelez rasiz, Si tres grant que par les nasiz leur saut le sanc plenierement; TL croit voir une nuance péjorative de rasiz dans ce passage; rasiz y semble au contraire mélioratif, ce que révèle de façon explicite le passage de AubreeE, v. aussi gastel rasis, TL 4,208; 8,318 sub rasseoir; 8,327 sub rastiz])
  • gastelet fourré “petit gastel (garni à l’intérieur)” (GuillDoleS 1504 [Si fist atorner le disner, Hastes et quanq’en pot trover, Bons vins et gastelez fourrez]; HuonR 4964 [Tost mengeroit trois gastelés fourés], TL 4,208; Gdf 4,241c)
  • ⁠employé métaphoriquement⁠ (WatrS [Puis raporterent amorez Gastelez de douz ris fourrez], TL 1,368 sub amorer; 3,2137 sub forrer)
  • “tourteau (t. de blason)” (doc. 14es. [A .VI. gastelez d’or en pié]; i.b. [Les ermines de Meuleun, d’asur, a un chief d’or, a .VI. gestelez d’or ou pié], Gdf 4,241c, v. gastel)
gastelier m.
(gastelier ChronSDenis Gdf; Taille1296M Gdf; Taille1297M Gdf; Taille1313M; doc. 1328 Gdf, ⁠Bev, gatelier Taille1313M, ⁠pic. vasteliers EustMoineF [sg.c.r.], ⁠norm.pic. wastelier LRougeEuL 1279 p. 36; LRougeEuL 1284 p. 44; [doc. 1355 Gdf], ⁠lorr. wastillers doc. 1241 Gdf, waistellier doc. [1331] JugMetzS, ⁠rég. wausteliers doc. 1324 Gdf)
  • “fabricant ou marchand de gastels (ca. 1230 [1217 comme nom de personne]Voult 1613, EustMoineF 1817 [Wistasces devint flaönniers Et esmeulliers (v. TL 3,1123) et vasteliers]; doc. 1241 Gdf; LRougeEuL 1279 p. 36; LRougeEuL 1284 p. 44; ChronSDenis Gdf; Taille1296M 92; 261; Taille1297M 306; Taille1313M 11; 235; doc. 1324 Gdf; doc. 1328 Gdf [Les boulengiers et gasteliers de Maante]; Bev 61 [Des estaux aux gasteliers; déf. “pâtissier, marchand de gâteaux”]; doc. 1331 JugMetzS; [doc. 1355 Gdf], TL 4,208; Gdf 4,241c; 6,608b sub rasis; FEW 17,547b [survit dans certains parlers du Nord-Ouest et du Centre])
  • ⁠[comme nom de personne: NecrArrB an 1217, p. 19a; 1225, p. 25a; 1229, p. 27b; 1263, p. 49c]⁠
gasteliere f.
(gasteliere Taille1296M; Taille1297M; doc. 1em. 14es. (?) Gdf, gastelliere doc. 1375 Gdf, ⁠lorr. waisteliere doc. 1350 Gdf)
  • “fabricante ou marchande de gastels (1296 [1205 comme nom de personne]14es., Taille1296M 52 [Perrenele la gasteliere]; Taille1297M 46; doc. 1em. 14es. (?) Gdf; doc. 1350 Gdf [Qu’il ne soit nulz boullengier, ne bollengieres, ne waistelieres qui…]; [doc. 1375 Gdf [Le suppliant prist des gasteaux d’une gastelliere qui les vendoit]], Gdf 4,242a; FEW 17,547b [en se référant à Gdf, donne par erreur 15es. au lieu de 14es. comme date d’apparition; d’autre part, notre documentation permet de reculer celle-ci au 13es.; survit dans le Centre])
  • ⁠comme nom de personne: NecrArrB an 1205, p. 12a].⁠
watteleuse f.
  • “fabricante ou marchande de gastels (?)” (doc. hain. 1339 gdf [Premiers dist qu’il embla a le maison les watteleuses a Hambaumes delez Cambron Saint Vineyen une cote de geme au pris de .XXV. s.t.; attestation unique que Gdf enregistre sans définition. Se rattache prob. à la famille de gastel; cp. mfr. gasteleur “boulanger qui fait des gâteaux” chez l’auteur norm. Le Fevre de la Boderie (FEW 17,547b); d’autre part, cp. les nombreuses graphies des mots de la famille de gastel en afr. où le s implosif n’est pas noté, notamment chez ceux avec initiale rég. w- (watel, watielle, watellerie)], Gdf 8,328b)
gastelerie f.
(gastelerie ca. 1275 LongnonDoc 2,53d; 105h; 171e; [doc. 1380 Gdf], gastellerie LongnonDoc 2,53dvar., ⁠rég. watellerie doc. s.d. Gdf)
  • “lieu où l’on fabrique ou vend des gastels (doc. 12751277, LongnonDoc 2,53d; doc. 1276/1278 LongnonDoc 2,105h; 171e; doc. s.d. Gdf 4,241c; [doc. mfr. 1380 Gdf [Tout le droit des commendises, talemesleries, gasteleries, messeries]], Gdf 4,241c [dans le dernier passage, déf. prob. par erreur “droit que payaient au seigneur ceux qui faisaient ou vendaient des gâteaux”, déf. reprise parle FEW]; FEW 17,547b)